Le 24 février 2025, le Conseil de l’Union européenne a adopté le Règlement (UE) 2025/395, modifiant le règlement (UE) n°833/2014 et marquant une nouvelle étape dans la politique de sanctions économiques à l’encontre de la Russie.

Ce 16ᵉ paquet de sanctions cible plusieurs domaines clés : les médias, l’exportation de technologies stratégiques, le commerce des matières premières, les transports, ainsi que le secteur financier. L’UE entend ainsi resserrer l’accès de la Russie aux ressources économiques et technologiques tout en limitant les possibilités de contournement des sanctions existantes.

Un encadrement plus strict des médias russes

L’une des premières décisions de ce paquet de sanctions concerne la prolongation de la suspension des licences de diffusion de certains médias russes. L’UE justifie cette mesure par le rôle central joué par ces médias dans la diffusion d’informations visant à influencer l’opinion publique et les processus démocratiques européens. La restriction ne se limite pas seulement aux chaînes de télévision et radios, mais s’étend à toute diffusion numérique sur le territoire européen.

Un renforcement des restrictions sur les exportations de technologies stratégiques

Dans le prolongement des restrictions antérieures, ce 16ᵉ paquet élargit l’interdiction d’exportation à un ensemble plus large de biens et technologies considérés comme stratégiques. La liste des biens à double usage concernés s’allonge, notamment pour inclure des technologies qui pourraient être utilisées dans le secteur militaire, comme les logiciels liés aux machines-outils à commande numérique (CNC), certains précurseurs chimiques et des composants électroniques utilisés dans les drones et les missiles.

En outre, l’UE cible plus directement les acteurs industriels et technologiques soutenant l’effort de guerre. Cinquante-trois nouvelles entités, y compris des sociétés basées dans des pays tiers mais participant à l’approvisionnement russe en technologies de pointe, ont été ajoutées à la liste des entités soumises à des restrictions. L’accent est également mis sur le contrôle du transit des biens via le territoire russe, afin d’éviter tout contournement des sanctions. Les exportateurs européens devront mettre en place des mécanismes de vigilance renforcés pour garantir que leurs produits ne se retrouvent pas indirectement dans des secteurs stratégiques russes.

De nouvelles limitations sur les importations en provenance de Russie

Les restrictions s’étendent également aux importations de matières premières et de ressources énergétiques. L’aluminium primaire russe fait désormais l’objet d’une interdiction d’importation au sein de l’Union européenne. Parallèlement, un mécanisme de surveillance des prix a été mis en place afin d’éviter tout impact excessif sur l’industrie européenne.

Dans le secteur de l’énergie, les nouvelles mesures visent particulièrement le commerce du pétrole et du gaz naturel liquéfié (GNL). Désormais, il est interdit de stocker temporairement du pétrole brut ou des produits pétroliers russes sur le territoire de l’Union, quelle que soit leur destination finale.

Les services de transbordement du GNL russe sont également restreints, sauf pour les États membres enclavés dont l’approvisionnement dépend de cette ressource. De plus, l’UE bloque l’importation de GNL via des terminaux non connectés au réseau gazier interconnecté européen, renforçant ainsi son objectif de réduction de la dépendance énergétique.

Le secteur du commerce des diamants n’échappe pas à ces mesures. L’UE introduit une obligation de certification pour les diamants bruts, exigeant la mention explicite de leur pays d’origine. Quant aux diamants polis, les exigences de traçabilité sont repoussées afin de permettre un alignement des pratiques avec celles des partenaires du G7 et des pays tiers.

Des restrictions accrues sur les transports et les infrastructures logistiques

Le secteur des transports est également impacté par ces nouvelles mesures. L’espace aérien européen reste fermé aux compagnies aériennes russes, mais cette interdiction est désormais étendue aux transporteurs qui assurent des vols intérieurs en Russie ou qui participent à la fourniture d’aéronefs et de pièces détachées.

Dans le domaine du transport routier, l’UE impose de nouvelles restrictions aux entreprises détenues à plus de 25 % par des actionnaires russes, leur interdisant toute nouvelle opération de transport sur le territoire européen. De même, les entreprises de transport établies avant avril 2022 ne peuvent pas augmenter la participation d’actionnaires russes au-delà de ce seuil.

L’Union cible également les infrastructures portuaires et aéroportuaires identifiées comme facilitant le transfert de drones, de missiles et de technologies militaires. Les opérateurs économiques européens devront ainsi adapter leurs activités pour éviter tout engagement avec ces infrastructures.

Des restrictions financières et technologiques renforcées

Les sanctions financières prennent une nouvelle dimension avec un élargissement des restrictions imposées aux banques et services financiers russes. L’accès au service de messagerie financière SWIFT est désormais interdit pour un nombre accru d’établissements russes, ce qui vise à limiter leur capacité à effectuer des paiements transfrontaliers.

Le secteur des technologies est également concerné, avec l’interdiction de fournir certains logiciels de gestion d’entreprise et de conception industrielle à des sociétés russes. L’UE interdit également le transfert de droits de propriété intellectuelle ou de secrets d’affaires liés à ces technologies.

Enfin, les transactions avec certaines banques utilisant les cryptomonnaies sont également restreintes, dans le but de limiter d’éventuelles tentatives de contournement des sanctions financières.

Des exceptions prévues pour certains secteurs stratégiques

Si ces sanctions restreignent les échanges économiques avec la Russie, elles prévoient toutefois des dérogations pour certains secteurs jugés stratégiques ou sensibles. Les exportations de technologies médicales et pharmaceutiques restent autorisées sous certaines conditions, de même que certains services d’ingénierie destinés aux ambassades et représentations diplomatiques russes.

Par ailleurs, la Hongrie et la Slovaquie bénéficient d’une exception temporaire leur permettant d’importer certains produits pétroliers spécifiques, afin d’assurer leur sécurité d’approvisionnement.